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ORAGE

MATHIS BERCHERY

Doucement glissait l'idée liquide 

Que tout pouvait 

Disparaître 

 

et que rien ne nous 

retenait

que la contemplation

tant que 

 

nous trions à force d'emplois 

 

le temps 

 

que nous avons appris 

à compter au-delà

des doigts. 

 

On dirait que les mots sont des pierres 

que les pierres sont des lois

que les lois sont des règles

Et que les règles ne sont pas 

naturelles, 

échappent à la chute,

mais les règles coulent sans ordre,

gonflent les poches et s'assèchent les membranes, 

s'évacuent le temps craqué le sang,

et s'évacuent de même le sens le souffle

et respire la tête 

regonfle recommence à signifier 

le mot le corps la matrice. 

 

J'évacue le sens pour faire entrer un nouveau-né 

le mot le même

le sens un autre

et l'on croirait que tout tourne 

revient au panier premier 

mais non vous vieillissez 

 

et des mots disparaissent

 

des mots apparaissent naissent

 

et vous fouillez les raisons le peu d'être fou au ventre ou vieux déjà 

 

cela arrive et rien n'y fait

vous jouez des chants d'oubli, des danses d'hystérie,

tandis que tout fuit et vous de même

mais vous ne saviez pas que c'est dans l'ordre des choses

que depuis le début tout tombe en fuite depuis les peaux coupées 

qui se régénèrent, ressemblent,

mais ne sont pas à jamais naturalisées. 

 

Rester respirer l'odeur des règles 

qui ne durent pas

molles règles

molles langues 

mous mots

emballés de plastiques transparent l'illusion

qui n'ont de vérité que des reflets de plaques plues 

 

Rien n'est dur

je passe à travers des murs 

qui n'existent pas mais

qui tombent 

 

Je prends des nuages 

et
reconnais des mots en formes et

je sors un son

articulé qui n'est pas nuage

est un souffle surtout

buée sur la vitre,

et la pluie vient

viendra toujours tombante

battante et

les nuages sont des ciels

alors qu'il pleut un plafond

les mots sont inaudibles, sont hurlés

la moitié des phrases est emportée dans 

l'eau qui coule

coulera toujours fuyante

dans les sens, tous,

sans direction favorite,

sans être une pierre.

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Mathis Berchery travaille au croisement de la littérature et des arts visuels. Il est attentif aux conditions et contextes dans lesquels les expériences artistiques, poétiques et littéraires sont écrites et rendues publiques. Nourri de philosophie, éthologie et anthropologie, il ironise les habitudes humaines modernes et leurs limites, et développe une relation corporelle et tactile au texte. Diplômé des Beaux-Arts, il a intégré en 2018 le Master de création littéraire de l'université Paris 8 pour écrire les états sensationnels, livre-partition pour performance collective. En 2015 il a co-fondé le Collectif Uklukk avec Angèle Manuali, plasticienne et performeuse, avec qui il crée des évènements de poésie et performance, et des expositions in situ : Rendre. Vivant (2018), In-ouï.e (2020). En 2020, Mathis Berchery est accueilli en résidence croisé Itinéraire d'artiste(s) entre Rennes (Au bout du plongeoir), Brest (La Chapelle Dérézo) et Nantes (Les Fabriques), ainsi qu'à la Kesselhaus Anschapark à Kiel (Allemagne). Son travail a été montré notamment à Rennes au Musée des Beaux-Arts (2016), au Frac Bretagne (2020), au festival Foudre (2019) ; à Paris, à la Maison de la Poésie (2019), au Paris Art Lab (2020).

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